mercredi 30 mars 2011

LA DÉFENSE LINCOLN : UNE DÉFENSE QUI ROULE À FOND LA CAISSE !

On pourrait croire que les romans policiers sont plus faciles à adapter au cinéma que tout autre genre littéraire. Faux ! La profusion des indices, des liens et des leurres nécessitent une mise en place complexe. Trop d'informations, on s'y perd. Pas assez et le film devient prévisible. La défense Lincoln relève le défi avec succès sans révolutionner le genre. Voilà un film intelligent, bien fait, duquel on sort avec pour seul commentaire: " Ouais, hum, c'est bon...".

Difficile de raconter l'histoire sans voler la mèche mais disons qu'un avocat de la défense (Matthiew McConaughey) habitué de traiter avec des clients peu élégants se fait engager par un riche playboy (Ryan Phillipe) accusé d'agression et de tentative de meurtre sur une prostituée. N'en disons pas plus mais sachez que l'histoire multiplie les intrigues parallèles, les revirements de situations et les stratagèmes ingénieux. On ne s'emmerde pas.


Ceux qui, comme moi, sont des mordus de Michael Connelly apprécieront cette adaptation honnête et dynamique, d'autant plus que la seule autre transposition à l'écran de l'un de ses romans, Blood Work réalisé par Clint Eastwood en 2002, avait déçue unanimement. Cette fois, l'univers du romancier est soigneusement dépeint avec sa faune urbaine, ses personnages rusés et ses intrigues tentaculaires. Le scénario mélange habilement enquête trépidante et vie privée des personnages. Matthiew McConaughey est parfait dans le rôle de l'avocat et la réalisation de Brad Furman (un nouveau venu) nous tient en haleine tout au long le film.


Bon divertissement, certes, La défense Lincoln n'a toutefois pas l'étoffe d'un classique et ne restera pas non plus graver dans nos mémoires. Il lui manque ce "coup de fouet" qui possédaient des films comme "Seven" ou "Usual suspect" par exemple. Dans ce cas-ci, on a davantage affaire à un "Colombo Deluxe", bien ficelé et vite digéré.



Idéal pour vos samedis soirs, La défense Lincoln a le mérite de nous accrocher un sourire au visage pendant 2 heures et franchement, c'est déjà pas mal !

mardi 29 mars 2011

JO POUR JONATHAN: PARI RÉUSSI

Pas facile de rendre cinématographique un portrait réaliste du désoeuvrement de la jeunesse. Grand est le risque de tomber dans les tranches de vie contemplatives que l'on nomme "poésie du quotidien" pour qualifier ces films d'auteurs sincères mais souvent ennuyeux. Heureusement, Maxime Giroux évite le piège. Son "Jo pour Jonathan" soutient l'intérêt du spectateur du début jusqu'à la fin avec une histoire forte, bien filmée et troublante de vérités.


Jonathan et son grand frère sont passionnés de course de voitures clandestines. Lorsque Jonathan perd une course et s'avère incapable d'honorer son pari, son grand frère propose à l'adversaire un arrangement "quitte ou double'', mais les choses tournent mal et la dette de Jo envers son frère sera beaucoup plus importante que prévue.


Disons-le, "Jo pour Jonathan" n'est pas un film grand public. Les courses de voitures ici n'ont rien à voir avec Nitro ou Fast & Furious. Il s'agit d'un film à petit budget, mimimaliste, qui jette un regard personnel sur un phénomène de société. De notre société ! Celle du Québec et de ses banlieues. Les trottoirs longeant les autoroutes, les parcs industriels, les stationnements de centres commerciaux converties en terrains de jeu le soir venu, Maxime Giroux pointe du doigt sans le nommer ce qui embrouillent l'esprit et l'âme de ses personnages.


Tous les comédiens, Raphaël Lacaille en tête, sont criants de vérité. On sent d'ailleurs que le réalisateur connaît bien ce monde particulier. Les dialogues reprennent le langage tronqué de nos ados et les vraies choses se disent par texto. Même les décors fades deviennent des personnages tellement ils nous sont familiers. Jamais le propos du film n'interrompt l'histoire et c'est une qualité rare chez un auteur. Non vraiment ! Il n'y a pas grand chose à reprocher à ce film dès lors qu'on accepte sa vision épurée du problème.


On sort de "Jo pour Jonathan" avec le moton dans la gorge et l'étrange impression d'avoir compris que tout se joue à l'adolesence.

mardi 22 mars 2011

SANS LIMITES : LES LIMITES D'UNE BONNE IDÉE

"Sans limites" se voulait une façon originale d'aborder le problème de la drogue. Ironiquement, le film perd son identité en cours de route, ne devenant que le pâle reflet de son potentiel original. Ses créateurs auraient-ils consommé trop de TNZ ?

Elle avait pourtant bien démarrée cette histoire de pilule qui décuple les facultés intellectuelles. Dommage que le scénario dérape en chemin . À croire qu'on a voulu écarter toutes les questions liées au sujet. Même les effets secondaires, annoncés comme l'enjeu dramatique du film, se retrouvent balayés sous le tapis. Aucune réflexion ne vous sera imposée, n'ayez crainte, c'est une histoire de bons et de méchants. Cette pilule, c'est comme les microfilms dans les James Bond. Tout le monde est prêt à tuer pour l'avoir, c'est tout ce qui importe.

Reste la réalisation de Neil Burger. Tout l'intérêt du film repose sur les contrastes de mise en scène entre les moments de sobriété et les effets spectaculaires que procure la drogue. La luminosité accrue, les images accélérées, le soucis des détails fascinent l'oeil du spectateur. Notons l'éblouissante Abbie Cornish appelée à devenir une grande star.



Une fois la pilule avalée, on se rend compte que "Sans limites" n'est rien d'autre qu'une série B qui multiplie les rebondissements invraisemblables et les compromis faciles, comme du popcorn trop salé, on ressent vite le manque de consistance et le besoin de se réhydrater...

mardi 15 mars 2011

BATTLE L.A.: 2 REMAKES POUR LE PRIX DE 1

J'imagine assez bien un producteur s'asseoir devant le patron du studio et dire: - J'ai une idée ! Faisons un croisement entre La chute du faucon noir et Independance Day !

- Cool ! Qui le réalisera ?


- Jonathan Liebesman, un tâcheron spécialisé dans les remakes.


- Cool !

Sur papier, Battle: L.A. devait être un film prometteur, une valeur sûre au Box Office. Le résultat est efficace sans être émouvant, spectaculaire sans avoir de personnalité. Les amateurs de films d'actions seront bien servis, à condition de n'attendre que cela.
Les producteurs ont bien fait leur boulot. Les effets spéciaux sont réussis et tout le film ressemble à un gros feu d'artifices. Battle: LA s'inscrit dans la lignée des 2012 et autres Transformers. Le rythme est soutenu, la destruction vaut le coup d'oeil et l'apocalypse est au rendez-vous ! Du gros divertissement viril.

L'histoire est simple: Des extra-terrestres très très méchants envahissent notre planète et nous suivons un commando de marines très très courageux qui vont les affronter.

Tout est garoché dans ce film: les bombes, l'histoire, les personnages. On cherche tellement à nous en mettre plein la vue que le spectateur est souvent pris au dépourvu, étourdi par une caméra à l'épaule qui n'en finit plus de brasser, les créateurs du films étant persuadés que plus t'en mets, mieux ce sera. La technique du "shaky cam" est en train de devenir un genre en soit, mais tous les réalisateurs ( aussi virils soit-ils) ne maîtrisent pas cet art musclé du mouvement saccadé. Le réalisateur Jonathan Liebesman en fait trop, filmant tout, trop vite, sans moduler son histoire ou créer de moments privilégiés. Les quelques scènes d'émotions sont tellement engluées de patriotisme qu'elles frôlent le ridicule.

Il y a néanmoins quelques bons moments. La séquence au poste de police est bien menée. Aaron Eckhart tire son épingle du jeu, donnant une touche de subtilité à un personnage qui n'en a pas. L'ensemble se laisse regarder à condition d'aimer l'action et juste l'action.

À vous de voir quelles sont vos exigences.

jeudi 10 mars 2011

RANGO

Je ne suis pas un amateur de films d'animation en général mais l'approche "western-spagetti" de Rango a piqué ma curiosité. Forcé d'admettre que je me suis franchement amusé.

L'histoire est simple comme dans tout bon western qui se respecte: Un caméléon domestique se retrouve par accident au beau milieu du désert, dans un village poussiéreux, où l'eau vaut son pesant d'or...pour ne pas dire: une poignée de dollars. Après une suite d'imbroglios spectaculaires, notre héros devient shérif du village et doit retrouver les cambrioleurs qui ont volé les réserves d'eau de la banque !


Réalisé par Gore Verbinski (créateur de "Pirates des Caraïbes"), Rango ne manquera pas de faire sourire les cinéphiles. Les premiers 30 minutes sont carrément hilarantes tant par son humour que sa mise en scène. Si vous vous ennuyez des visages crasseux qui peuplaient les films de Sergio Leone, vous serez servis avec les faces-de-rats et les créatures reptiliennes de Rango. Tout y est: la poussière, les gros plans, les trench-coats, les grands-angles, tout, même ce brin de poésie qui caractérisaient les oeuvres de Leone.


Le film n'échappe toutefois pas à certaines longueurs. Les personnages manquent de répliques savoureuses et l'histoire s'enlise dans les clins d'oeil aux genres. Les cinéphiles en seront ravie mais le grand public trouvera les personnages peu attachants et l'histoire convenue.


Visuellement, Rango est un petit bijou. Sa mise en scène léchée et complexe se veut un hommage aux grands maîtres du cinéma et à leurs coups-de-génie. Par contre, la magie propre aux oeuvres de Pixar ou Disney n'y est pas. À trop vouloir parodier, le film manque d'unité. Des scènes comme "la poursuite de la diligence" par exemple se révèle époustouflante, capable de faire rougir un Michael Bay mais laisserait dubitatif un Spielberg soucieux de la continuité.


Dernier point, le film s'adresse plus aux cinéphiles qu'aux familles. Il faut aimer et connaître le cinéma pour vraiment apprécier Rango. Les personnages glauques, la mise en scène appuyée et les références underground qui constituent la trame du film risquent d'ennuyer les enfants et leurs parents.


3.5/5


samedi 5 mars 2011

DES HOMMES ET DES DIEUX

Au moment où le maire de Saguenay se bat pour rétablir la prière au Conseil Municipal de sa région, voilà que sort sur les écrans du Québec "Des hommes et des dieux" de Xavier Beauvois. Il y a belle lurette que la Foi n'est plus au goût du jour dans le cinéma occidental, sinon pour justifier des personnages douteux. Le dernier en lys, si ma mémoire est bonne, c'était "Mission" de Roland Joffé qui remonte à 1986. Nous ne parlons pas ici de films bibliques tel que "Passion" de Mel Gibson mais bien de films qui s'interrogent sur le mystère de la Foi.

"Des hommes et des dieux", c'est une communauté de missionnaires postés en Algérie au milieu des années 90. Ils soignent les gens et viennent en aide aux gens de la région. Lorsqu'une insurrection d'extrémistes musulmans se prépare, leur vie est menacée. Les prêtres voudraient partir mais leur Foi leur commande de rester. Sont-ils prêt à devenir des martyrs au nom de Seigneur? Telle est la question.
Si "Mission" de Roland Joffé se voulait un film où la conversion d'un inculte se faisait à travers une suite d'épreuves et d'affrontements spectaculaires, où la dévotion des personnages se mêlait aux scènes d'actions, Xavier Beauvois propose plutôt un film lent et méditatif, simple et poétique. Malgré cela, les 2 heures passent rapidement. Les tourments, les doutes et les questionnement auxquelles sont confrontés les missionnaires donnent aux plans séquences et aux personnages immobiles une intensité remarquable. Les nombreuses prières qui parsèment le film revêtent une dimension ambiguë. Xavier Beauvois n'essaye pas de nous convertir mais pose plutôt le problème de la Foi et ses contradictions. Il ne s'agit pas d'un film religieux mais d'un drame psychologique.
Cinématographiquement, le film est simple et sans effets particuliers. Le silence des personnages est plus évocateur que leurs paroles. La mort plane sur ces scènes de la vie quotidienne, sur ces personnages qui s'accrochent à leur routine. La direction photo est crue et sublime, la beauté des paysages algériens laisse un arrière-goût amer qui participe à l'atmosphère. On s'y croirait.

Si Lambert Wilson offre une interprétation solide, Michael Lonsdale est émouvant dans le rôle d'un médecin vieillissant qui n'a plus rien à perdre. Seul petit bémol, la finale est trop rapide mais "Des hommes et des dieux" demeure un film d'une richesse rare.

4/5