jeudi 21 avril 2011

LES PETITS MOUCHOIRS: Petits secrets entre amis

S'immiscer pendant 2h30 dans les petits secrets d'une bande de copains aurait pu devenir fastidieux. Mais non ! Avec une bonne dose d'humour, une belle dynamique de groupe et une brochette de personnages passés maîtres dans l'art de se mentir à soi-même, "Les petits mouchoirs" nous renvoie à cette fameuse poutre qu'on a dans l'oeil. À mi-chemin entre le drame et le feel good movie, Guillaume Canet signe une oeuvre lucide, habile et divertissante, un joli clin d'oeil à nos actes manqués...

Résumons l'histoire: Même si l'un d'eux vient d'avoir un grave accident, un groupe d'amis décide quand même de partir en vacances tel que prévu.


Dès les premières images du film, le ton est donné: ambiance festive, surannée, sur laquelle le drame tisse sa toile. La force des "Petits mouchoirs", c'est justement ce goût du plaisir que porte les personnages. Sans jamais tomber dans la caricature ou les stéréotypes, Canet a choisi de mettre en scène des gens ordinaires dans une situation qui sort à peine de l'ordinaire, d'où cette impression d'authenticité qui sert autant l'humour du film que ses moments plus dramatiques. D'abord comique, on comprend vite que les travers de chacun s'avèrent lourds à porter au quotidien. Le but des vacances, c'est de s'amuser et quoi qu'il arrive, la fête doit continuer. Le plaisir donc, à tout prix, que les silences puis les aveux viendront troubler. Le bord de mer, la plage et les excursions bâteaux empêchent les révélations d'alourdir l'intrigue. Le scénario est d'autant plus habile que jamais le récit ne verse dans le film à sketch où chaque personnage aurait son épisode. Au contraire, tout le film est bercé par une dynamique de groupe où le regard des autres devient primordial. Autre idée rafraîchissante, on évite le discours sur les classes sociales, issus de différents milieux, les personnages sont d'abord unis par une amitié de longue date.


Les interprétations sont impeccables, en particulier François Cluzet et Mario Cotillard qui dominent la distribution avec des personnages légèrement plus importants que les autres. La réalisation de Guillaume Canet est posée, méthodique, scrutant ses comédiens à la loupe, soucieux de mettre en évidence les nuances de leur jeu, les non-dits, les contradictions de chacun. En prime, la finale est particulièrement touchante. Conclusion: un film à voir et à méditer.

jeudi 14 avril 2011

Quand vulgarité rime avec originalité...ou presque

"Son altesse" essaye d'être à la fantasy ce que Austin Powers fut à James Bond, c'est-à-dire une parodie scabreuse où les codes du genre sont avalés tout rond pour être ensuite expulsés sous forme de jokes scatologiques. Ici, toutefois, ce sont les perversions sexuelles qui sont à l'honneur... et pas les moindres. Repoussant les limites de la vulgarité dans l'espoir de nous faire rire, les créateurs du film ont choisi la provocation comme cheval de bataille. Dépourvu de créativité mais non d'audace, "Son altesse" pourrait aussi bien gagner le razzies du pire film de l'année que devenir un film culte. Allez savoir.

Résumons: Un preux chevalier, accompagné par son frère aussi taré que libidineux, vole au secours de sa fiancée enlevée par un méchant sorcier.

À voir son casting prestigieux, ses effets spéciaux réussis et son budget respectable, on se dit que le projet devait susciter beaucoup d'espoir chez les producteurs. De fait, "Son altesse" n'est pas une comédie comme les autres. Sa proposition est audacieuse: être vulgaire jusqu'à la limite du 13+. Ceux qui trouvaient "American pie" culotté devront attacher leur ceinture avant d'aller voir  le fil de David Gordon Green (Ananas Express). La moralité n'a jamais eu si mauvais goût. L'objectif est clair: nous faire rire jaune, tourner les tabous en ridicule. Sodomie, pédophilie et castration sont au menu, le tout nappé d'un langage vulgaire. Cela dit, la présentation est impeccable: les décors, les effets spéciaux, même la réalisation n'est pas fauchée, ce qui est plutôt rare pour une comédie de cette acabit.

Malheureusement, plus le film avance et moins les rires sont nombreux. D'un part, on s'habitue au concept. D'autre part, la provocation oublie parfois d'être drôle, misant trop facilement sur le malaise pour déclencher le rire. Si James Franco nous amuse en preux chevalier, Nathalie Portman semble inconfortable dans ce "teenage movie" qui mise uniquement sur sa beauté. Quant à Danny McBride dans rôle du con, il n'a pas le talent d'un Jim Carrey ou d'un Will Farrell pour nous faire avaler ses pitreries.

En résumé, "Your Highness" ne se déguste pas, il s'avale tout rond. Au bout de quelques heures, il n'en restera probablement rien mais il est possible que l'envie vous reprenne quelques mois plus tard...en DVD.

mardi 12 avril 2011

HANNA: Un Petit chaperon rouge à la sauce Jason Bourne

Le mélange des genres au cinéma est toujours une entreprise risquée. Cette fois, le film d'action côtoie le conte pour enfant. Imaginez un Petit Chaperon Rouge à la sauce Jason Bourne et vous obtenez ''Hanna'' de Joe Wright, un film d'action efficace doté d'une ambiance inusitée, proche de la fable, riche en surprises, mené tambours battant et qui nous tient en haleine presque jusqu'au bout. Dommage que la finale tombe à plat.

Résumons l'histoire: Une fillette élevée dans la forêt par son père, un espion en fuite, devra mettre en pratique ses techniques de survie pour échapper à l'organisation secrète qui les pourchasse.

Ceux qui ont aimé la série Jason Bourne seront séduit par ''Hanna'' qui reprend le thème de la quête d'identité, les combats spectaculaires et bien sûr, l'impitoyable chasse à l'homme. La jeune Saoirse Ronan est parfaitement crédible en tueuse experte. Par ailleurs, la musique techno de Chemical Brothers donne à certaines scènes des allures de ''Cours Lola cours''.

Cate Blanchett, à la tête de l'Organisation, se délecte dans son rôle du Grand Méchant Loup. Belle et froide, elle se comporte en véritable prédateur. Tant les références que la mise en scène de Joe Wright évoquent le conte pour enfant. À travers cette chasse à l'homme effrénée, la jeune fille prendra conscience qu'elle est une adolescente et c'est ce qui permet à ''Hanna'' de se démarquer, ce passage de l'enfance au monde adulte au coeur même du film d'action.

Malheureusement, le réalisateur se laisse prendre à son propre jeu et la finale sombre dans la métaphore pure et simple, dénudée de logique et pauvre en action. L'autre problème vient du personnage d'Eric Bana, non pas l'acteur qui livre une belle performance, mais de ce père dont les motivations profondes ne sont pas très claires, voire même douteuses. On comprend, après coup, que le but n'était qu'un prétexte pour stimuler l'action et c'est bien dommage.

Cela dit, on passe un bon moment, l'action est au rendez-vous, la musique est bonne et l'ambiance du film place ''Hanna'' dans une catégorie à part. Comme dans un conte pour enfant, la magie opère à condition de ne pas trop se poser de questions...

jeudi 7 avril 2011

BUMRUSH: The Expendables vs Boyz N' the hood

Michel Jetté avait pris tout le monde par surprise avec "Hochelaga", voyage initiatique d'une recrue au pays des motards criminalisés. Son "Histoire de pen" était moins percutante mais tout aussi cinglante. Avec Bumrush, Jetté hésite entre l'étude sociologique des milieux criminels (sa marque de commerce) et le film d'action typique des années 80. Mauvais mélange...

Alors qu'un gang de rue tente d'infiltrer son établissement, le propriétaire d'un bar de danseuses fait appel à ses veux potes, d'anciens vétérans de l'armée, pour faire le ménage au sein du crime organisé.

Il y a deux volets à ce film. D'une part, l'étude sociale du monde criminel auquelle Michel Jetté nous a habitué. La hiérarchie des gangs, l'enjeu des territoires et leurs méthodes peu orthodoxes composent une toile du fond riche et fascinante. Le problème vient des personnages principaux, les bons gars, ces ''videurs'' plus grands que nature, modelés sur les ''action heros'' de nos voisins du sud. Ces ''gros bras'' ne collent tout simplement pas avec le reste du film. On dirait ''the Expendables'' contre ''Boyz n' the hood''. Avec une dégaine à la Bud Spencer, Pat Lemaire et ses ''frères d'armes'' se battent comme Steven Seagal, manient les armes comme Rambo et causent comme Patrick Swayze dans Road House. On a presque droit au fameux : ''Cette fois-ci, c'est personnel ! ''.

Michel Jetté n'a jamais été reconnu pour sa direction d'acteurs. Plusieurs répliques sonnent fausses, à l'image de cette mise en scène tapageuse. On se demande où Michel Jetté voulait en venir. Ni film d'action, ni film d'auteur, Bumrush tire dans toutes les directions sans toucher quoi que ce soit.

C'est dommage dans la mesure où la cinéma québécois produit peu de films réalistes sur le milieu criminel et les précédentes oeuvres de Michel Jetté avaient l'avantage de poser un regard personnel sur un univers brutal et omniprésent dans notre paysage médiatique. Espérons qu'il reviendra à ses premières amours au lieu de lorgner du coté d'Hollywood.

mercredi 6 avril 2011

LES COLIS: TROP VITE EXPÉDIÉ

Suis-je trop facile à prendre au jeu ? Oui c'est cucu, mélo, facile et moralisateur...mais tellement sympathique ! Comédie sans prétention saupoudrée de bons sentiments, Le Colis n'ira pas aux Oscars, c'est certain, mais vous passerez un bon moment et oui, on rit, les situations cocasses ne manquent pas, les éclats de rire sont nombreux et le sourire nous reste accroché au visage durant toute la projection. Pas un grand film mais diablement agréable !


Résumons la prémisse: un livreur maladroit kidnappe, pour le compte d'un escroc, un riche entrepreneur qui s'avère être un joueur compulsif totalement ruiné.


La réalisatrice Gaël D'Ynglemare en doit une à Francis Veber. Son livreur est calqué sur le fameux personnage de François Pignon, maladroit au grand coeur qui s'embourbe constamment dans ses propres gaffes. Emmanuel Bilodeau est excellent comme toujours dans ce rôle la fois drôle et touchant d'un homme incapable de subvenir aux besoins de sa famille. Gildor Roy s'avère moins crédible dans la peau du riche entrepreneur. Il joue la comédie alors qu'il fallait jouer le drame...le résultat aurait été plus drôle. La jeune Alice Morel-Michaud est adorable dans le rôle de la petite fille à son papa et Evelyn de la Chenelière est charmante en épouse de ce même papa. En revanche, les personnages secondaires sont caricaturés à outrance et brisent ce fragile équilibre qui empêche souvent les comédies de sombrer dans le ridicule. François Léveillé, Jean-Marie Corbeille et Jean-François Mercier jouent comme s'ils étaient sur la scène du Festival Juste Pour Rire, nuisant du coup à la crédibilité de certaines scènes. À leur décharge, la caricature outrancière semble être le parti pris de la réalisatrice.




Mais bon ! Cela n'empêche pas de rire et de passer un bon moment pour peu que l'on se prête au jeu de bonne foi...

LE CODE SOURCE : LA SOURCE DU CODE

Depuis Matrix, le thriller psychotronic est devenu un sous-genre prestigieux. De Total Recall à Inception en passant par Existenz et Paycheck, la psyché humaine et particulièrement la mémoire semble devenue un enjeu convoité par les tout-puissants de ce monde. Sans égaler Inception, le Code Source offre à la science-fiction une nouvelle oeuvre intelligente, originale et audacieuse.

Résumons le concept: Un pilote de l'armée participe à un programme expérimental qui consiste à se projeter dans la psyché d'une personne et revivre les 8 dernières minutes de sa vie. Le but étant de découvrir l'identité d'un terroriste qui a fait exploser un train.


Au départ, l'idée de revivre ces 8 minutes à répétition comme dans Le Jour de la Marmotte ne m'enchantait guère. De fait, la première partie du film m'aurait paru laborieuse n'eut été de l'état d'esprit du pilote (Kake Gyllenhaal) qui participe à cette expérience malgré lui. Du film concept, on passe au suspense bicéphale et franchement, c'est là que réside toute la richesse du Code Source. On ne se contente pas de pourchasser un terroriste, on s'interroge sur les implications d'une technologie comme celle-là.


De le décrire comme un croisement en Minority Report et Groundhog Day est un peu réducteur mais bon, la filiation paraît inévitable. Cela dit, le résultat est surprenant et terriblement efficace. Jake Gyllenhaal est crédible comme tout le reste de la distribution. Tourné à Montréal, le train est rempli de visage familiers qui feront sourire les spectateurs québécois. La réalisation de Duncan Jones est honorable sans vraiment attirer notre attention.


En sommes, Le Code Source s'inscrit dans la tradition des oeuvres de science-fiction intelligentes, à la fois cérébrale et touchante, un heureux mélange qui ravira les amateurs du genre.

vendredi 1 avril 2011

JALOUX

Le cinéma de genre made in Québec peine à prendre son envol. Il suffit de lire le désaveux public du scénariste d'Angle Mort récemment dans les journaux pour s'en convaincre. Le problème avec ce genre de films, c'est qu'on en a vu d'autres, beaucoup d'autres. Quand on s'embarque là-dedans, y vaut mieux avoir une carte secrète dans sa manche, sinon on compare et on se désole. Ça prenait de l'audace pour tourner "Jaloux" sans l'aide financière du gouvernement... dommage que cette audace soit absente du scénario. Une demie réussite.


Résumons l'histoire: un couple sur le point de rompre se réfugie dans un chalet en campagne où ils subissent le harcèlement d'un voisin mystérieux.



La comparaison avec "Harry un ami qui vous veut du bien" est pratiquement inévitable mais passons outre. Le fait que "Jaloux" soit une production autofinancée me plaisait beaucoup, impatient que je suis de voir un film vraiment indépendant briller sur nos écrans. J'étais moins emballé à la perspective que l'improvisation soit à l'origine de certaines scènes du film. On improvise pas un suspense ! De fait, la dynamique du couple apparaît surlignée, ne laissant aucune place au non-dit. On a l'impression par moment d'assister à une improvisation mixte ayant pour titre "la jalousie", surtout dans la première partie du film.


Sophie Cadieux s'en tire bien, insufflant à son personnage une fausse naïveté qui nous donne parfois envie de la gifler et c'est tant mieux ! C'est ça le cinéma. En revanche, Maxime Dénommé ne semble pas avoir beaucoup creusé le psychologie de cette pâte molle qui regarde un étranger lui voler sa blonde sans réagir. Son jeu manque de bouillonnement intérieur, laissant à la mise en scène le soin de nous montrer ses malaises. Peut-être était-ce voulu ainsi mais le résultat sert mal les talents du comédien. Enfin, dans la peau du voisin, Benoît Gouin est inquiétant à souhait, bien que la catharsis de son personnage arrive trop tard. On aurait aimé qu'il éclate plus tôt, surtout que sa nature instable nous est présentée dès les premières images du film.


La réalisation de Patrick Demers se cherche un style. Il filme l'action avec une économie de plans, presque minimaliste mais pas assez pour que cela devienne un parti pris, du coup on se demande si c'est volontaire ou s'il a manqué de temps pour filmer les scènes à sa convenance.


L'histoire prend toutefois son élan en deuxième partie, lorsque l'identité du voisin est enfin questionnée et que débute, à proprement parler, le véritable suspense. C'est à ce moment que Benoît Gouin révèle tout son talent et que le réalisateur semble le plus à son aise. Les surprises se succèdent alors et la finale nous laisse sur un beau malaise.


En définitive, "Jaloux" se laisse écouter, à condition de le regarder avec l'oeil d'un cinéphile indulgent, le prendre pour ce qu'il est, c'est-à-dire une film fait avec les moyens du bord, dans tous les sens du terme: une idée peu originale, un scénario vite esquissé et une réalisation qui n'atteint pas sa pleine mesure. Peut-être est-ce la faute à son budget modeste. Si c'est le cas, la prochaine fois, il vaudrait mieux se plier à la volonté des institutions...