vendredi 1 avril 2011

JALOUX

Le cinéma de genre made in Québec peine à prendre son envol. Il suffit de lire le désaveux public du scénariste d'Angle Mort récemment dans les journaux pour s'en convaincre. Le problème avec ce genre de films, c'est qu'on en a vu d'autres, beaucoup d'autres. Quand on s'embarque là-dedans, y vaut mieux avoir une carte secrète dans sa manche, sinon on compare et on se désole. Ça prenait de l'audace pour tourner "Jaloux" sans l'aide financière du gouvernement... dommage que cette audace soit absente du scénario. Une demie réussite.


Résumons l'histoire: un couple sur le point de rompre se réfugie dans un chalet en campagne où ils subissent le harcèlement d'un voisin mystérieux.



La comparaison avec "Harry un ami qui vous veut du bien" est pratiquement inévitable mais passons outre. Le fait que "Jaloux" soit une production autofinancée me plaisait beaucoup, impatient que je suis de voir un film vraiment indépendant briller sur nos écrans. J'étais moins emballé à la perspective que l'improvisation soit à l'origine de certaines scènes du film. On improvise pas un suspense ! De fait, la dynamique du couple apparaît surlignée, ne laissant aucune place au non-dit. On a l'impression par moment d'assister à une improvisation mixte ayant pour titre "la jalousie", surtout dans la première partie du film.


Sophie Cadieux s'en tire bien, insufflant à son personnage une fausse naïveté qui nous donne parfois envie de la gifler et c'est tant mieux ! C'est ça le cinéma. En revanche, Maxime Dénommé ne semble pas avoir beaucoup creusé le psychologie de cette pâte molle qui regarde un étranger lui voler sa blonde sans réagir. Son jeu manque de bouillonnement intérieur, laissant à la mise en scène le soin de nous montrer ses malaises. Peut-être était-ce voulu ainsi mais le résultat sert mal les talents du comédien. Enfin, dans la peau du voisin, Benoît Gouin est inquiétant à souhait, bien que la catharsis de son personnage arrive trop tard. On aurait aimé qu'il éclate plus tôt, surtout que sa nature instable nous est présentée dès les premières images du film.


La réalisation de Patrick Demers se cherche un style. Il filme l'action avec une économie de plans, presque minimaliste mais pas assez pour que cela devienne un parti pris, du coup on se demande si c'est volontaire ou s'il a manqué de temps pour filmer les scènes à sa convenance.


L'histoire prend toutefois son élan en deuxième partie, lorsque l'identité du voisin est enfin questionnée et que débute, à proprement parler, le véritable suspense. C'est à ce moment que Benoît Gouin révèle tout son talent et que le réalisateur semble le plus à son aise. Les surprises se succèdent alors et la finale nous laisse sur un beau malaise.


En définitive, "Jaloux" se laisse écouter, à condition de le regarder avec l'oeil d'un cinéphile indulgent, le prendre pour ce qu'il est, c'est-à-dire une film fait avec les moyens du bord, dans tous les sens du terme: une idée peu originale, un scénario vite esquissé et une réalisation qui n'atteint pas sa pleine mesure. Peut-être est-ce la faute à son budget modeste. Si c'est le cas, la prochaine fois, il vaudrait mieux se plier à la volonté des institutions...

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire