mercredi 21 janvier 2015

Nos étoiles contraires


Il y a de ces films qui nous prennent à la gorge sans prévenir. Je donnais 20 minutes à cette guimauve pour adolescents, le temps de préparer mon souper et basta, une demi-heure gros max.  Moi, les amourettes d'une fille à moitié morte, avec des tubes à oxygène dans le nez, qui reprend goût à la vie après avoir rencontrer le gars parfait: Non merci  ! Ma propre condition d'homme célibataire de 42 ans à moitié désabusé ne me permet pas ce genre de luxe. Et bien mes amis, j'ai été agréablement surpris.

The fault in our stars est l'un  de ces petits films sans prétention qui réussi l'exploit peu banal d'être un feel good movie à propos la mort.

Si l'histoire d'amour est typiquement hollywoodienne (trop belle pour être vrai) la narration, elle, surprend dès le départ, Hazel nous annonçant d'emblée qu'elle en a marre des films sur le cancer et des clichés habituels. Heureuse nouvelle en effet puisque c'est aussi mon cas !  La seule raison pour laquelle j'ai loué ce DVD (ben oui, j'en suis encore là), c'est parce qu'il était disponible à la bibliothèque et donc gratuit. Mon scepticisme n'en était pas moins vif et purulent, comme un gros bouton tout blanc qu'on s'apprête de péter. 
Au bout de quelques minutes, me voilà séduit par l'ambiance légère et rigolote de ce teenage movie hors norme. Non seulement la mort est abordée de front mais en plus, les personnages s'en accomodent fort bien. Ils sont jeunes, ils sont beaux et mourir est, ma foi, leur passe-temps favori. Quand une scène lorgne vers le cliché, un élément incongru vient aussitôt détourner mon attention. Les choses sont dites et vécues à la manière d'un drame mais jamais l'histoire ne sombre dans l'apitoiement, à croire que cette bluette a été écrite pour une cyniques dans mon genre.

La grande thématique du film, ce n'est pas la mort mais l'importance de ne pas arrêter de vivre pour autant. Les deux personnages principaux ont déjà fait leur deuil, c'est réglé. Sans avenir, avec un passé miné par de faux espoirs de guérison, ils n'ont plus que le présent à s'offrir mutuellement.  Et c'est peut-être dans grande vérité universelle que réside toute la magie du film: se concentrer sur le moment présent, quel que soit notre qualité de vie.  Quand un tel propos est amené  avec autant de charme et de lucidité: difficile d'y résister.

Le parti pris du film, c'est de laisser les personnages secondaires vivent le drame en tant que tel. Laura Dern, dans le rôle de la mère, nous fait comprendre à quel point la résilience est un processus volontaire. Toujours prête à aider sa fille, le sourire aux lèvres, on sent néanmoins la peur et l'appréhension dans son regard, elle qui cherche déjà à donner un sens à sa vie après que son enfant aura disparu. L'ensemble des personnages secondaires offre d'ailleurs un beau portrait des idées reçues dans notre société face  la mort. À ce chapitre, les scènes avec l'écrivain sont particulièrement savoureuses. Le cancer lui-même est relégué au rang de personnage secondaire. On ne cherche pas à nous enterrer sous une tonne d'informations médicales, ni à dénoncer le réseau de la santé. Les scènes d'hôpitaux sont courtes et ellipsées, non pour éviter le sujet mais parce que c'est leur lot quotidien.

Tout est là: dans cette manière positive d'aborder un sujet aussi dramatique. La maladie a déjà gagné et du coup, elle n'a plus d'emprise, ni sur le récit, ni sur les personnages. C'est comme si le film nous racontait le troisième acte du tragédie où les protagonistes s'acharnent à s'offrir un happy end. On ne trouve pas, comme souvent au cinéma, d'éléments perturbateurs qui poussent nos héros (ou anti-héros) à se remettre en question. L'audace et la beauté de The fault in our stars  est de fonctionner presque sans aucun ressort dramatique outre la prémisse du départ. On mise essentiellement sur l'attitude débonnaire des personnages et leur quête de bonheur.

Il est rassurant de voir qu'on produise de nos jours des films pour adolescents sur des sujets aussi délicats. D'ailleurs, l'audace fut payante. Avec un coût de production de 13 millions, le film en a récolté presque 300 à l'échelle mondiale, preuve que la jeunesse n'est pas effrayée par les sujets difficiles. Bien sûr, tout est une question de dosage. On croit souvent - à tord - que les films d'auteurs sont des oeuvres plus profondes parce qu'ils sont plus lourds. Le rythme et l'humour de The fault in our stars en font une oeuvre beaucoup plus facile à digérer, mais sa pertinente demeure. Souhaitons que plus d'auteurs prennent cette direction.
La réalisation effacée de Josh Boone s'efforce surtout à mettre en valeur un scénario bien ficelé où l'intensité des émotions est constamment mise en abîme de manière efficace. On reprochera à l'ensemble quelques clichés contournables. Il va sans dire qu'on ne se lance pas dans un mélodrame sans essayer de stimuler un brin les glandes lacrymales du spectateur. En ce qui me concerne, ils ont réussi. Ce mélange de goût de vivre et de lucidité m'ait allé droit au coeur.

Shailene Woodley et Ansel Elgort, tous deux transfuges de la série Divergence, livrent des interprétations à la fois touchantes et crédibles. Woodley est particulièrement douée pour jouer tout en retenue. Encore une fois, Laura Dern prouve qu'elle est l'une des plus grandes actrices de sa génération. Malgré sa courte présence à l'écran, elle parvient à nous faire sentir tout son parcours de mère.

En sommes, un petit film à découvrir, plein de qualités et d'audaces avec, par-ci par-là quelques défauts qu'on aura vite fait de pardonner.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire